Devenir Factory of the Future, c'est avant tout travailler dur
Comment construire un système de production qui produit à un rythme soutenu tout en ayant la flexibilité inhérente pour gérer sans problème toutes les variations possibles d'un produit? Ontex à Eeklo est parvenu à relever cet énorme défi, comme en témoignent ses titres de Factory of the Future 2016 et 2019.
Le directeur de l'usine, Jef Monballyu, est l'un des architectes derrière le succès du site de production de Flandre orientale. Il nous expose d'abord les facteurs du marché dans lequel ils opèrent: "En tant que producteur de solutions d'hygiène, nous avons trois grands piliers: les soins pour bébés, les solutions pour l'incontinence et l'hygiène féminine. Dans l'usine d'Eeklo, nous fabriquons principalement des produits de la dernière catégorie, bien que nous produisions également des couches-culottes et, depuis l'année dernière, des masques buccaux médicaux. Le marché sur lequel nous opérons est principalement le secteur retail en Europe occidentale, même si certains produits vont bien au-delà, comme en Australie et aux Etats-Unis".
"L'usine d'Eeklo a le grand avantage d'être située à seulement 35 kilomètres du port de Zeebruges et à 70 kilomètres de celui d'Anvers. Le transport par mer est beaucoup moins cher que par route et cela fait une grande différence sur le prix, tant pour nos exportations que pour l'approvisionnement en matières premières. Cela compense les coûts de main-d'œuvre plus élevés auxquels nous sommes confrontés ici".

La diversité des produits constitue un gros défi
"Sur notre marché, il est essentiel de répondre aux changements quotidiens. C'est typique du marché retail. Tous les détaillants ont à peu près les mêmes produits dans leur gamme, mais ils veulent se distinguer en y apportant leur propre touche. Pour nous, le défi consiste à organiser nos lignes de production de manière à pouvoir produire ces versions spécifiques pour différents clients sur une même ligne. Il s'agit d'une question extrêmement complexe. Nous devons constamment nous assurer que nous pouvons garantir notre flexibilité de manière efficace. Une partie de la solution réside dans l'automatisation poussée. Nous appliquons cette philosophie depuis un certain temps."
Premier prix en 2016
"C'est pour cette raison que le premier parcours vers le titre de Factory of the Future en 2016 s'est déroulé sans accroc. C'est Fedustria qui nous a signalé l'existence de ce parcours et qui nous a encouragés à y participer. Nous avons obtenu des notes allant de bonnes à très bonnes sur presque tous les points de l'audit. Ontex Eeklo était déjà naturellement et inconsciemment élaboré comme une usine du futur. Le premier titre en était donc une conséquence logique. Cela ne veut pas dire que nous pouvions nous reposer sur nos lauriers. En participant au programme, nous avons fait la connaissance d'autres entreprises, nous avons vu comment elles abordent leur processus et nous avons découvert d'autres technologies. En ce sens, remporter le premier titre n'était pas une fin mais le début d'un nouveau flux. Toutefois, nous ne pouvons pas mettre en œuvre tous les projets que nous voulons car nous faisons partie du groupe Ontex, qui possède des usines sur les cinq continents. Nous devons donc opérer en restant dans certaines limites. Comme Ontex est géré depuis la Belgique, nous faisons officie d'usine pilote au sein de notre groupe. Il arrive souvent que notre technologie soit également utilisée dans les 18 autres usines Ontex".
22 lignes automatisées
"Nous disposons de 22 lignes de production automatisées. Certaines font 45 mètres de long et sont commandées par un ou deux opérateurs seulement. Les machines qui y sont installées sont principalement des machines existantes, mais nous les adaptons nous-mêmes en fonction de nos besoins. Cette ingénierie est l'un de nos points forts. Utiliser les nouvelles technologies est une chose, mais il faut aussi maintenir ses machines à jour. Cela n'est possible que si les connaissances internes et techniques sont à la hauteur."

Structure logistique
"Nous jouons aussi la carte de l'automatisation-numérisation pour l'emballage. Les entrepôts de matières premières nouvellement approvisionnés sont automatiquement attribués de sorte que les caristes savent exactement où placer leurs chargements grâce à des lecteurs de codes-barres. Nous travaillons également de la même manière à partir de la production".
"Lorsqu'un nouveau lot est démarré, l'ordre de fabrication et le BOM (Bill of Materials) sont à la disposition des opérateurs grâce au MES (Manufacturing Execution System). Ils peuvent transmettres aux chariots élévateurs les matières premières dont ils ont besoin et le conducteur reçoit immédiatement cette demande sur son écran. Dès que l'opérateur scanne sa palette et la met en production, l'opération est enregistrée dans le MES. Toutes les étapes qui se produisent plus tard dans le processus de production sont également communiquées via le système MES. Cela se fait en partie automatiquement grâce aux informations de l'automate, mais il y a aussi une importante intervention humaine de la part de l'opérateur. L'interprétation de certains problèmes ou blocages au moyen de simples codes d'erreur n'est pas toujours claire. Travailler de manière flexible ne signifie donc pas toujours se contenter d'automatiser. A certains endroits du département emballage, par exemple, nous optons consciemment pour l'apport humain car la flexibilité d'un travailleur y est beaucoup plus grande. En cas de changements soudains, les gens sont beaucoup plus rapides".
Focus sur l'écologie
"Lorsque nous concevons de nouveaux produits, nous effectuons toujours une analyse du cycle de vie: de quelles machines avons-nous besoin, de quels emballages avons-nous besoin, comment pouvons-nous utiliser un maximum de matériaux recyclables, comment pouvons-nous organiser le transport? Ces dernières années, les détaillants se sont davantage concentrés sur la durabilité. Nous avons déjà bien progressé dans ce domaine. Les emballages plus facilement recyclables en sont un bon exemple. En ce qui concerne le transport, je voudrais souligner l'optimisation du nombre de produits sur une palette. Nous le faisons de deux manières: d'une part, nous compressons les produits autant que possible et, d'autre part, nous ajustons les dimensions des boîtes et des sacs de manière à exploiter au mieux l'espace des camions. Cela permet d'économiser énormément sur les coûts de transport. Aujourd'hui, de nombreux détaillants travaillent également avec des entrepôts automatisés, ce qui signifie qu'ils imposent certaines exigences quant à la forme de la chaîne d'approvisionnement. Cela a nécessité les adaptations nécessaires au sein d'Ontex, et pas seulement à Eeklo".
Le capital humain
"Le grand défi concernant le personnel a été de rallier tout le monde à la voie de l'automatisation. J'ai appris plusieurs choses de mes collègues du groupe Factory of the Future. Par exemple, notre système de communication pour le transfert des équipes est greffé sur celui de Veranneman Technical Textiles".
"L'information est tellement importante dans le fonctionnement d'une entreprise! Chacun prend des décisions sur base des informations disponibles. Si quelqu'un fait une erreur, en tant qu'entreprise, vous devez toujours vous demander: comment cette erreur a-t-elle pu se produire? Disposait-on de toutes les informations requises? Il arrive plus souvent qu'on ne croit que ce n'est pas le cas. Nous essayons d'y remédier grâce à ce système de transfert".
TOUT CE QUI BRILLE N'EST PAS DE L'OR
"L'automatisation est un travail difficile. J'oserais même utiliser le mot 'combat' car tout ne se passe pas comme sur des roulettes. Par exemple, un projet avec un WMS (Warehouse Management System) a échoué l'année dernière parce que le fournisseur a été dépassé par la complexité. Il y a donc parfois un mur entre le désir et la réalité. De toute façon, l'idée du 'nice to have' n'est plus à l'ordre du jour. Seuls les projets ayant un certain délai d'amortissement sont réalisés, et même dans ce cas, il est difficile de faire rentrer ces investissements. Il faut donc un peu de persuasion et de créativité. Je me souviens du premier robot à Eeklo. Le responsable de l'époque n'était pas du tout convaincu. Non seulement le budget était un problème, mais il craignait aussi que nous perdions en flexibilité. Le fournisseur a alors proposé de louer le robot, ce qui a finalement débouché sur son installation définitive. Et aujourd'hui, il y a plus d'une centaine de ces robots chez Ontex".


